rien à dire, je préfère laisser les autres parler
Manque d'assiduité sur ce blog. Plusieurs raisons :
- G la flemme
- G rien à dire (à ce sujet, faut-il écrire un post pour dire qu'on n'a rien à dire?)
- G aut' choz' à faire
- Je suis blasée par ce blog
J'ai bien quelques trucs sous la main susceptibles de faire un ou deux post potables, mais bon...Bon,,
je me lance : sur les conseils d'un ami, j'ai lu le discours d'Harold
Pinter (prix nobel de littérature), je file le lien pour ceux qui
auront le courage de lire les 10 pages
http://nobelprize.org/literature/laureates/2005/pinter-lecture-f.html
et voici quelques extraits pour les paresseux :
"[…] la majorité des hommes
politiques, à en croire les éléments dont nous disposons, ne s’intéressent pas
à la vérité mais au pouvoir et au maintien de ce pouvoir. Pour maintenir ce
pouvoir il est essentiel que les gens demeurent dans l’ignorance, qu’ils vivent
dans l’ignorance de la vérité, jusqu’à la vérité de leur propre vie. Ce qui
nous entoure est donc un vaste tissu de mensonges, dont nous nous nourrissons.
Comme le sait ici tout un
chacun, l’argument avancé pour justifier l’invasion de l’Irak était que Saddam
Hussein détenait un arsenal extrêmement dangereux d’armes de destruction
massive, dont certaines pouvaient être déchargées en 45 minutes, provoquant un
effroyable carnage. On nous assurait que c’était vrai. Ce n’était pas vrai. On
nous disait que l’Irak entretenait des relations avec Al Qaïda et avait donc sa
part de responsabilité dans l’atrocité du 11 septembre 2001 à New York. On nous
assurait que c’était vrai. Ce n’était pas vrai. On nous disait que l’Irak
menaçait la sécurité du monde. On nous assurait que c’était vrai. Ce n’était
pas vrai.
La vérité est totalement
différente. La vérité est liée à la façon dont les États-Unis comprennent leur
rôle dans le monde et la façon dont ils choisissent de l’incarner.
Mais avant de revenir au temps
présent, j’aimerais considérer l’histoire récente, j’entends par là la
politique étrangère des États-Unis depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Je crois qu’il est pour nous impératif de soumettre cette période à un examen
rigoureux, quoique limité, forcément, par le temps dont nous disposons ici.
Tout le monde sait ce qui s’est
passé en Union Soviétique et dans toute l’Europe de l’Est durant l’après-guerre
: la brutalité systématique, les atrocités largement répandues, la répression
impitoyable de toute pensée indépendante. Tout cela a été pleinement documenté
et attesté.
Mais je soutiens que les crimes
commis par les États-Unis durant cette même période n’ont été que
superficiellement rapportés, encore moins documentés, encore moins reconnus,
encore moins identifiés à des crimes tout court. Je crois que la question doit
être abordée et que la vérité a un rapport évident avec l’état actuel du monde.[…]
les actions menées dans le monde entier par les États-Unis donnaient clairement
à entendre qu’ils avaient décrété avoir carte blanche pour faire ce qu’ils
voulaient.
L’invasion directe d’un état
souverain n’a jamais été, de fait, la méthode privilégiée de l’Amérique. Dans
l’ensemble, elle préférait ce qu’elle a qualifié de « conflit de faible
intensité ».« Conflit de faible intensité », cela veut dire que des milliers de
gens meurent, mais plus lentement que si vous lâchiez une bombe sur eux d’un
seul coup. Cela veut dire que vous contaminez le cœur du pays, que vous y
implantez une tumeur maligne et que vous observez s’étendre la gangrène. Une
fois que le peuple a été soumis – ou battu à mort – ça revient au même – et que
vos amis, les militaires et les grandes sociétés commerciales, sont
confortablement installés au pouvoir, vous allez devant les caméras et vous déclarez
que la démocratie l’a emporté. C’était monnaie courante dans la politique
étrangère américaine dans les années auxquelles je fais allusion.
La tragédie du Nicaragua s’est
avérée être un cas extrêmement révélateur. Si je décide de l’évoquer ici, c’est
qu’il illustre de façon convaincante la façon dont l’Amérique envisage son rôle
dans le monde, aussi bien à l’époque qu’aujourd’hui.
J’ai assisté à une réunion qui
s’est tenue à l’Ambassade des États-Unis à Londres à la fin des années 80.
Le Congrès américain était sur
le point de décider s’il fallait ou non donner davantage d’argent aux Contras
dans la campagne qu’ils menaient contre l’État du Nicaragua. J’étais là en tant
que membre d’une délégation parlant au nom du Nicaragua, mais le membre le plus
important de cette délégation était un certain Père John Metcalf. Le chef de
file du camp américain était Raymond Seitz (alors bras droit de l’ambassadeur,
lui-même nommé ambassadeur par la suite). Père Metcalf a dit : « Monsieur, j’ai
la charge d’une paroisse au nord du Nicaragua. Mes paroissiens ont construit
une école, un centre médico-social, un centre culturel. Nous avons vécu en
paix. Il y a quelques mois une force de la Contra a attaqué la paroisse. Ils
ont tout détruit : l’école, le centre médico-social, le centre culturel. Ils
ont violé les infirmières et les institutrices, massacré les médecins, de la
manière la plus brutale. Ils se sont comportés comme des sauvages. Je vous en
supplie, exigez du gouvernement américain qu’il retire son soutien à cette
odieuse activité terroriste. »
Raymond Seitz avait très bonne
réputation, celle d’un homme rationnel, responsable et très bien informé. Il
était grandement respecté dans les cercles diplomatiques. Il a écouté, marqué
une pause, puis parlé avec une certaine gravité. « Père, dit-il, laissez-moi
vous dire une chose. En temps de guerre, les innocents souffrent toujours. » Il
y eut un silence glacial. Nous l’avons regardé d’un œil fixe. Il n’a pas
bronché.
Les innocents, certes, souffrent
toujours.
Finalement quelqu’un a dit : «
Mais dans le cas qui nous occupe, des « innocents » ont été les victimes d’une
atrocité innommable financée par votre gouvernement, une parmi tant d’autres.
Si le Congrès accorde davantage d’argent aux Contras, d’autres atrocités de
cette espèce seront perpétrées. N’est-ce pas le cas ? Votre gouvernement
n’est-il pas par là même coupable de soutenir des actes meurtriers et
destructeurs commis sur les citoyens d’un état souverain ? »
Seitz était imperturbable. « Je
ne suis pas d’accord que les faits, tels qu’ils nous ont été exposés, appuient
ce que vous affirmez là », dit-il.
Alors que nous quittions
l’ambassade, un conseiller américain m’a dit qu’il aimait beaucoup mes pièces.
Je n’ai pas répondu.
Je dois vous rappeler qu’à l’époque
le Président Reagan avait fait la déclaration suivante : « Les Contras sont
l’équivalent moral de nos Pères fondateurs. »
Les
États-Unis ont pendant plus de quarante ans soutenu la dictature brutale de
Somoza au Nicaragua. Le peuple nicaraguayen, sous la conduite des Sandinistes, a renversé ce
régime en 1979, une révolution populaire et poignante."
Voila, c'était un peu long (désolée ole). En tout cas,
ça répond en partie à la question "à quoi ça sert un prix Nobel?".