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zinezinefromspace
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20 janvier 2006

rien à dire, je préfère laisser les autres parler

haroldpinter_markatkinspicManque d'assiduité sur ce blog. Plusieurs raisons :
- G la flemme
- G rien à dire (à ce sujet, faut-il écrire un post pour dire qu'on n'a rien à dire?)
- G aut' choz' à faire
- Je suis blasée par ce blog
J'ai bien quelques trucs sous la main susceptibles de faire un ou deux post potables, mais bon...
Bon,, je me lance : sur les conseils d'un ami, j'ai lu le discours d'Harold Pinter (prix nobel de littérature), je file le lien pour ceux qui auront le courage de lire les 10 pages
http://nobelprize.org/literature/laureates/2005/pinter-lecture-f.html
et voici quelques extraits pour les paresseux :

"[…] la majorité des hommes politiques, à en croire les éléments dont nous disposons, ne s’intéressent pas à la vérité mais au pouvoir et au maintien de ce pouvoir. Pour maintenir ce pouvoir il est essentiel que les gens demeurent dans l’ignorance, qu’ils vivent dans l’ignorance de la vérité, jusqu’à la vérité de leur propre vie. Ce qui nous entoure est donc un vaste tissu de mensonges, dont nous nous nourrissons.
Comme le sait ici tout un chacun, l’argument avancé pour justifier l’invasion de l’Irak était que Saddam Hussein détenait un arsenal extrêmement dangereux d’armes de destruction massive, dont certaines pouvaient être déchargées en 45 minutes, provoquant un effroyable carnage. On nous assurait que c’était vrai. Ce n’était pas vrai. On nous disait que l’Irak entretenait des relations avec Al Qaïda et avait donc sa part de responsabilité dans l’atrocité du 11 septembre 2001 à New York. On nous assurait que c’était vrai. Ce n’était pas vrai. On nous disait que l’Irak menaçait la sécurité du monde. On nous assurait que c’était vrai. Ce n’était pas vrai.
La vérité est totalement différente. La vérité est liée à la façon dont les États-Unis comprennent leur rôle dans le monde et la façon dont ils choisissent de l’incarner.
Mais avant de revenir au temps présent, j’aimerais considérer l’histoire récente, j’entends par là la politique étrangère des États-Unis depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Je crois qu’il est pour nous impératif de soumettre cette période à un examen rigoureux, quoique limité, forcément, par le temps dont nous disposons ici.
Tout le monde sait ce qui s’est passé en Union Soviétique et dans toute l’Europe de l’Est durant l’après-guerre : la brutalité systématique, les atrocités largement répandues, la répression impitoyable de toute pensée indépendante. Tout cela a été pleinement documenté et attesté.
Mais je soutiens que les crimes commis par les États-Unis durant cette même période n’ont été que superficiellement rapportés, encore moins documentés, encore moins reconnus, encore moins identifiés à des crimes tout court. Je crois que la question doit être abordée et que la vérité a un rapport évident avec l’état actuel du monde.[…] les actions menées dans le monde entier par les États-Unis donnaient clairement à entendre qu’ils avaient décrété avoir carte blanche pour faire ce qu’ils voulaient.
L’invasion directe d’un état souverain n’a jamais été, de fait, la méthode privilégiée de l’Amérique. Dans l’ensemble, elle préférait ce qu’elle a qualifié de « conflit de faible intensité ».« Conflit de faible intensité », cela veut dire que des milliers de gens meurent, mais plus lentement que si vous lâchiez une bombe sur eux d’un seul coup. Cela veut dire que vous contaminez le cœur du pays, que vous y implantez une tumeur maligne et que vous observez s’étendre la gangrène. Une fois que le peuple a été soumis – ou battu à mort – ça revient au même – et que vos amis, les militaires et les grandes sociétés commerciales, sont confortablement installés au pouvoir, vous allez devant les caméras et vous déclarez que la démocratie l’a emporté. C’était monnaie courante dans la politique étrangère américaine dans les années auxquelles je fais allusion.
La tragédie du Nicaragua s’est avérée être un cas extrêmement révélateur. Si je décide de l’évoquer ici, c’est qu’il illustre de façon convaincante la façon dont l’Amérique envisage son rôle dans le monde, aussi bien à l’époque qu’aujourd’hui.
J’ai assisté à une réunion qui s’est tenue à l’Ambassade des États-Unis à Londres à la fin des années 80.
Le Congrès américain était sur le point de décider s’il fallait ou non donner davantage d’argent aux Contras dans la campagne qu’ils menaient contre l’État du Nicaragua. J’étais là en tant que membre d’une délégation parlant au nom du Nicaragua, mais le membre le plus important de cette délégation était un certain Père John Metcalf. Le chef de file du camp américain était Raymond Seitz (alors bras droit de l’ambassadeur, lui-même nommé ambassadeur par la suite). Père Metcalf a dit : « Monsieur, j’ai la charge d’une paroisse au nord du Nicaragua. Mes paroissiens ont construit une école, un centre médico-social, un centre culturel. Nous avons vécu en paix. Il y a quelques mois une force de la Contra a attaqué la paroisse. Ils ont tout détruit : l’école, le centre médico-social, le centre culturel. Ils ont violé les infirmières et les institutrices, massacré les médecins, de la manière la plus brutale. Ils se sont comportés comme des sauvages. Je vous en supplie, exigez du gouvernement américain qu’il retire son soutien à cette odieuse activité terroriste. »
Raymond Seitz avait très bonne réputation, celle d’un homme rationnel, responsable et très bien informé. Il était grandement respecté dans les cercles diplomatiques. Il a écouté, marqué une pause, puis parlé avec une certaine gravité. « Père, dit-il, laissez-moi vous dire une chose. En temps de guerre, les innocents souffrent toujours. » Il y eut un silence glacial. Nous l’avons regardé d’un œil fixe. Il n’a pas bronché.
Les innocents, certes, souffrent toujours.
Finalement quelqu’un a dit : « Mais dans le cas qui nous occupe, des « innocents » ont été les victimes d’une atrocité innommable financée par votre gouvernement, une parmi tant d’autres. Si le Congrès accorde davantage d’argent aux Contras, d’autres atrocités de cette espèce seront perpétrées. N’est-ce pas le cas ? Votre gouvernement n’est-il pas par là même coupable de soutenir des actes meurtriers et destructeurs commis sur les citoyens d’un état souverain ? »
Seitz était imperturbable. « Je ne suis pas d’accord que les faits, tels qu’ils nous ont été exposés, appuient ce que vous affirmez là », dit-il.
Alors que nous quittions l’ambassade, un conseiller américain m’a dit qu’il aimait beaucoup mes pièces. Je n’ai pas répondu.
Je dois vous rappeler qu’à l’époque le Président Reagan avait fait la déclaration suivante : « Les Contras sont l’équivalent moral de nos Pères fondateurs. »
Les États-Unis ont pendant plus de quarante ans soutenu la dictature brutale de Somoza au Nicaragua. Le peuple nicaraguayen, sous la conduite des Sandinistes, a renversé ce régime en 1979, une révolution populaire et poignante."
Voila, c'était un peu long (désolée ole). En tout cas, ça répond en partie à la question "à quoi ça sert un prix Nobel?".

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